“Quand on est jeune médecin dans l'hôpital public, on galère”

“Quand on est jeune médecin dans l'hôpital public, on galère”

#actu

Un rapport sur le salaire des PH fait réagir les jeunes médecins.

Ils font partie des 1% les mieux payés de la fonction publique, soit un peu moins de 50 000 personnes en France qui gagnent en moyenne 7850 euros net mensuels. Eux, ce sont les membres de la fonction publique hospitalière, notamment certains praticiens hospitaliers et personnels hospitalo-universitaires. Ils constituent la majorité de ce groupe (26 260 emplois) qui compte également des fonctionnaires d’État et territoriaux, selon un rapport de l’Insee portant sur les hautes rémunérations dans la fonction publique sorti le 21 février. On y apprend par exemple que les PH gagnent en moyenne 5 549 euros net par mois (en équivalent temps plein).

En isolant ces 1% les mieux payés de la fonction publique, on ne peut que conclure que travailler à l'hôpital public, ce serait donc être assuré d’un salaire confortable... Non ?

“Devenir PH, c’est un parcours du combattant”


“C’est un parcours du combattant pour accéder à ces postes !”, assure pourtant Tania*, assistante spécialiste en psychiatrie dans une grande ville. “Le poste de PH, c’est le CDI de la fonction hospitalière. C’est rarissime d’en obtenir un après l’internat. On l’obtient des années plus tard, et on est rémunérés au premier échelon… Parce que l’ancienneté, accumulée après ces petits contrats, n’est pas prise en compte”.

De fait, le rapport de l’Insee précise, sans surprise, que “la rémunération croît avec l’âge. Ainsi, les plus de 55 ans représentent plus de la moitié du dernier centile (contre 21 % de l’ensemble de la fonction publique).” Parmi eux, 33% seulement sont des femmes.

“Quand on est jeune médecin, on a tout un éventail de contrats précaires, courts, avant de parvenir à ce statut de PH”, continue la psy. “Et avec des salaires pas du tout comparables à ceux des 1% à plus de 7000 euros évoqués dans le rapport”. En contrat d’un an, et mère de deux enfants, elle gagne 2500 euros net par mois. “Pour l’instant, on me propose de me renouveler mon contrat sur le même régime. Avant de devenir assistante spécialiste, j’étais praticien attaché pendant un an et demi. Au début, on m’a proposé un temps partiel : à 50% puis 80%. Ce n’est qu’au bout de six mois que j’ai pu travailler à temps plein, et gagner 2000 euros”.

“Je ne peux pas faire d’emprunt pour acheter un studio”


“Ce n’est pas du tout notre réalité”, soupire Anissa*, la trentaine, assistante des hôpitaux, lorsqu’on lui cite quelques chiffres du rapport. “A l'hôpital Saint Antoine où je travaille, je suis en bas de l’échelle au niveau des salaires, et pourtant je travaille tous les jours et un week-end sur deux.”

Et cela a des répercussions sur tous les pans de la vie de cette anesthésiste. Sa vie sociale en prend un coup, mais pas que. Elle gagne 2670 euros bruts (sans les gardes) et n’arrive pas à s’acheter un studio : “Mon contrat est précaire. Pour les banques, tant qu’on est pas installés en libéral, on n’est pas solvables. Et puis si au moins on avait des avantages en nature, comme une voiture de fonction ou des tickets restaurant. Mais on n’a même pas une bouteille d’eau fournie par l'hôpital pendant nos gardes ! En France, lorsqu’on est jeune médecin dans l'hôpital public, on galère.”

“Ce qui est pertinent, c’est de comparer au privé”


“Il y a des disparités, c’est certain”, assure Jacques Trévidic, président d'Action praticiens hôpital (APH). “Les rémunérations des jeunes médecins sont totalement insuffisantes pour être concurrentielles, ce qui crée un problème d’engagement dans une carrière hospitalière. Il y a 13 échelons : il faut 20 ans pour les monter.” Le pharmacien hospitalier à Caudan, dans le Morbihan, résume : “Il y a des différences de rémunération entre les spécialités, entre les jeunes médecins et ceux qui ont 20 ans d'ancienneté, mais ce qui est pertinent, c’est de comparer les rémunérations en fonction de ce qui se fait dans le privé, par rapport au même niveau de qualification. Dans certaines disciplines, l'écart est très très important, il faudrait revaloriser la carrière des praticiens hospitaliers et particulièrement les débuts de carrières.”

Le rapport lui-même le précise dès l’introduction : “Les plus hauts salaires dans le privé sont plus élevés que dans le public (le dernier centile excède de 30 % celui de la fonction publique) et l’éventail des revenus d’activité y est plus étendu.”

Et Jacques Trévidic de conclure : “Ce qui est curieux, c’est que ce rapport arrive au moment où vont démarrer, début mars, avec le ministère de la Santé, les discussions statutaires. Je note la coïncidence !”

*le prénom a été modifié

Pas encore adhérent ?

Faites partie de la communauté des Jeunes Médecins

  • > Faites-vous entendre et participez au renouveau de la profession
  • > Profitez des offres et des avantages réservés aux adhérents
  • > Participez aux événements dans votre région