Polémique fakemed, combattre ou accompagner ses usages, Jeunes Médecins enquête 

Polémique fakemed, combattre ou accompagner ses usages, Jeunes Médecins enquête 

Après sa vidéo controversée, Jeunes Médecins répond, sans compromis. Un éminent professeur de santé publique décrypte. Et un membre fondateur du collectif anti-fakemed enfonce le clou.

Vous vous êtes faits sacrément épingler sur les réseaux sociaux fin mai après la mise en ligne d’une vidéo sur l’hygiène menstruelle. Qu’est-ce qui a provoqué cette effervescence ?

Emanuel Loeb, président de Jeunes Médecins : Ça, c’est vrai que nous ne l’avions pas vu venir. Nous avons voulu mettre en place un format de rencontre régulier qui s’appelle « Regards Croisés », dont l’objectif est de réunir, autour d’un parcours d’usagers de santé, un(e) usager(e) et un jeune médecin. Et pour donner plus de visibilité à la formule, nous avons voulu faire coïncider la sortie de ces différents formats avec les journées dédiées à un sujet de santé publique précis. Le 28 mai étant la Journée mondiale de l'hygiène menstruelle 2021, nous avons retenu ce thème. Nous avons regardé sur les réseaux sociaux quels étaient les usagers et influenceurs compétents qui pouvaient traiter de ce sujet-là. Nous avons retenu Tiphaine, qui est médecin gynécologue et une usagère de santé, Laurène. C’est au cours de l’enregistrement, quand elle se présente, que nous avons appris que Laurène était naturopathe. Je ne suis pas celui qui les avait sélectionnées. Mais à l’arrivée, comme cette intervenante était face à une jeune médecin, je trouvais l’approche intéressante, un peu novatrice.

Ce qui n’a pas été du goût de tout le monde…

Emanuel Loeb : En effet, son activité commerciale en tant que naturopathe a attiré l’attention des anti-fakemed, ce collectif de médecins qui a pour objet de traquer, sur les réseaux sociaux, tout ce qui pourrait s’apparenter à de la médecine alternative. Ils ont notamment pour fait d’armes d’avoir obtenu le déremboursement de l’homéopathie.

Du coup, vous regrettez de l’avoir choisie ?

Emanuel Loeb : A titre individuel, je suis moi aussi assez braqué contre ces pratiques alternatives. Après, force est de constater que ces approches ont une audience auprès des usagers de santé et que justement, depuis la polémique liée à notre vidéo, je trouve intéressant d’essayer de se poser des questions : est-ce que la stratégie de la prohibition que veut mettre en place le collectif anti-fakemed est vraiment le meilleur moyen de ramener la population vers des soins conventionnels ?
Ce sont des personnes qui s’octroient un devoir de dire le bien et le mal, comme si les choix de société n’étaient que manichéens : les bons d’un côté, les méchants de l’autre.
Peut-être que la question n’est pas tellement de lutter contre, mais de savoir comment accompagner les usagers de santé, tout en s’assurant que les personnes qui les accompagnent, médecins diplômés inclus, respectent bien les données de la science, issues de la littérature. Mais Il n’y avait aucune volonté de notre part de faire de la provoc’.

Quel sera le thème de l’Episode 2 de vos Regards Croisés ?

Emanuel Loeb : Ce sera sur l’endométriose.

L’ANALYSE DU SPÉCIALISTE



Mathématicien et psychiatre de formation, le chercheur Bruno Falissard est professeur de santé publique à l’université de Paris Saclay. Parmi ses thèmes de recherches : «l’épistémologie et la méthodologie de recherche en médecine » et « l’évaluation des soins non conventionnels».

Pour ce spécialiste de la question, la réaction des internautes suite à la publication de la vidéo de Jeunes Médecins est tout sauf surprenante.
« Le sujet des soins non conventionnels est extrêmement clivant, surtout chez la communauté médicale. Mais il convient de distinguer les enjeux concrets des enjeux idéologiques. Autant, il est en effet extrêmement dangereux et condamnable de détourner les patients de la médecine classique, en les encourageant à arrêter leur traitement par exemple, comme ce peut être le cas de certains tenants extrêmes des soins non conventionnels, autant nous savons également que la biologie n’explique pas tout. Les médecins doivent eux aussi savoir faire preuve d’une certaine humilité. Et au-delà de ce qu’on appelle traditionnellement l’effet placebo qui, je trouve, est réducteur, les médecins gagneraient à apprendre à entrer en résonance avec les croyances, la mythologie propre du patient qu’ils suivent ».

LA RÉPONSE CASH DES ANTI-FAKEMED

Reste que pour en revenir à la vidéo incriminée, Jean-Jacques Fraslin, généraliste installé dans l’ouest de la France et l’un des membres fondateurs du collectif qui traque les « fakemed », estime que « Jeunes Médecins a eu une très mauvaise idée de faire intervenir une naturopathe, une discipline dont la formation, en France, très hétérogène, n’est validée par aucun Diplôme d’Etat ».

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Crédits photos : DR

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