“On a l’impression d’être envoyés au casse-pipe”

“On a l’impression d’être envoyés au casse-pipe”

Les Jeunes Médecins en branle-bas de combat

Engagés depuis le début de l’épidémie, les jeunes médecins sont en première ligne pour lutter contre le Covid-19. S’ils appréhendent la tempête à venir, leur motivation reste intacte.

“Il va y avoir du sport”. Dans son cabinet du 20e arrondissement de Paris, le médecin généraliste libéral David Azérad connaît des journées très “décousues” depuis le début de l’épidémie de Covid-19. “Mardi et lundi, on a eu une surcharge de sollicitations téléphoniques. On a passé la moitié de notre temps au téléphone. Certains coups de fil se sont transformés en consultation”, raconte-t-il. “On jongle avec consultations, absentéisme, téléconsultation, téléconseils téléphoniques… on est sur le pont”.

Les hôpitaux s’organisent


Du côté de l’hôpital Lariboisière, l’ambiance s'apparente au “calme avant la tempête”, rapporte Lamia Kerdjana, réanimatrice et présidente de Jeunes Médecins Île-de-France. Dans son service, elle note une “attente fébrile”, alors que l’activité du bloc chirurgical froid a été arrêtée vendredi, et que la capacité d’accueil en réanimation a “presque doublé”. “A Lariboisière, on a pas trop mal fait les choses”, juge Lamia.

Gabriel, interne en ophtalmologie, témoigne avoir “assisté toute la journée à la grande désorganisation de toute la médecine”.
“Tous les soins non urgent sont suspendus. Impossible de faire des explorations basiques en ville. La moitié des laboratoires en ville sont fermés, l'autre moitié tourne à mi temps”, relate-t-il. Il note “de grosses difficulté dans la prise et en charge et l'organisation des soins courants, notamment en Gériatrie”, alors que les services de son hôpital “se remplissent de Covid-19”. Pour David Azérad pas question de laisser passer les maladies du quotidien. “On [lui, ainsi que le reste des soignants officiant dans la maison de santé] reste particulièrement à l’affut des sollicitations qui ne sont pas du Covid-19”.

Une “motivation intacte” malgré la peur


“On est engagé avec dévouement et efficacité avec tout le personnel médical pour faire face à cette crise sanitaire. On est là, à cœur de continuer à être utile pour l’ensemble de population. C’est notre devoir”, lance un Padhue (un praticien à diplôme hors Union européenne).
“La motivation des soignants est intacte”, constate Lamia. Mais la réanimatrice reste tout de même anxieuse: “Après, nous manquons de matériel de protection: nous avons été victime de vols de masques et de gel hydroalcooliques, et nous sommes rationnés”, explique-t-elle. “On a vraiment l’impression d’être envoyés au casse pipe, on angoisse par rapport aux équipements de protection”.

Du côté de la maison de santé de David Azérad, “on essaie de dédramatiser en façade, lors des déjeuners par exemple. Mais on sent que tout le monde est sur le qui vive. L’ambiance est fébrile, c’est comme si on avait pris 5 cafés alors qu’on en boit pas.”

“Médecine de guerre”


Au delà des masques, Lamia s’inquiète des risques psycho-sociaux à venir. “Il va y avoir des morts. Je pense qu’on va devoir faire le deuil de sauver tout le monde”, se résigne-t-elle. “C’est là qu’une formation de médecine militaire n’aurait pas été de trop”, note-t-elle. Dans la région du Grand-Est, fortement touchée par la pandémie, les hôpitaux débordés vont devoir opérer un tri parmi les patients. “Le président a dit que nous étions en état de guerre, ça veut dire qu'on va faire une médecine de guerre. Dans la médecine civile, on met tout en œuvre pour sauver les personnes. Dans la médecine de guerre, il faut sauver le maximum de personnes qui ont les chances de survivre”, résume auprès du site Les Jours Yannick Gottwalles, chef de pôle des urgences de l'hôpital Pasteur à Colmar (Haut-Rhin).

Pour gérer cette angoisse du personnel soignant, mais aussi des familles, les psychiatres s’organisent pour mettre en place des cellules d’écoute en amont. Une initiative saluée par Lamia. “C’est une très bonne idée de l’anticiper. Sur certains hôpitaux, il y a des gens qui avaient envie d’aider. Leur rôle dans cette épidémie sera de nous soutenir dans cette épreuve”

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