“Il faut un traitement plus humain des requêtes des jeunes médecins par l’administration”

“Il faut un traitement plus humain des requêtes des jeunes médecins par l’administration”

Interview de Me Vianney Petetin, avocat de Jeunes Médecins

Avocat de Jeunes Médecins depuis sa création, Me Vianney Petetin revient sur les combats juridiques qu’il a menés sous la bannière du mouvement.

Jeunes Médecins a récemment fait condamner le ministre de la Santé, Olivier Véran. Comment s’est déroulée la procédure?

Jeunes Médecins était le seul syndicat représentatif à ne pas avoir été invité au Segur de la Santé. On a écrit au ministère pour demander à être réintégré. En l’absence de réponse du ministère, on a saisi le tribunal administratif de Paris d’un référé liberté. Une audience a été fixée, et aucun représentant du ministère ne s’est présenté. J’étais tout seul à plaider! La juge a décalé la fin de la procédure pour permettre au ministre de rectifier le tir. A 14h, il a écrit pour dire “on réintègre Jeunes Médecins au comité Ségur national”. Mais en fait, le Ségur est composé de deux structures: le comité Ségur national, et le groupe carrière et rémunération. Dans la foulée, nous avons écrit au tribunal pour leur faire part de notre désaccord, et l’instruction a été close sur ces débats là. Puis on a reçu la décision de la juge qui condamne Olivier Véran à nous intégrer dans le Ségur de la Santé. C’est une de nos victoires les plus emblématiques.

Il y en a d’autres?

La plus emblématique, c’est probablement la victoire du début de la crise covid. On a saisi le conseil d’état juste après le premier décret sur le confinement pour expliquer qu’il n’allait pas suffisamment loin, qu’il n’était pas assez précis, et que l’état n’avait pas pris la mesure de la gravité de la situation. C’est à la suite de ça qu’on a forcé l’état à revoir sa copie pour prendre des mesures de confinement plus strictes et encadrées afin de protéger davantage la population. Ca a été la première décision rendue par le conseil d’état sur la situation sanitaire et ça a lancé une quantité très impressionnante de procédures.

Est-ce nécessaire de gagner devant la justice pour faire changer les choses?

Pour le syndicat, on a dû engager plusieurs procédures. On en a gagné certaines, et le fait d’initier ces procédures a conduit à ce que l’administration corrige son comportement ou son manquement, avant même que le juge n’ait à statuer. Pendant la crise de la Covid, on a saisi le conseil d’état parce que les enfants de soignants étaient mis dans des classes séparés des autres. Notre requête a été rejetée parce qu’entre temps, le ministère s’est mis en conformité dans les académies où ça posait problème. On peut considérer que c’est une victoire: on est arrivé à notre but sans même que la justice ait à nous donner raison. Et c’est satisfaisant.

Dans le cadre de ton travail avec Jeunes Médecins, tu es aussi amené à suivre les litiges des adhérents qui demandent de l’aide. Peux tu développer cet aspect de ton travail?

Le syndicat fait office de plateforme d’aide, et on peut le saisir quand on en a besoin pour poser une question concernant son statut ou pour faire part d’une situation problématique pour laquelle on peut engager des actions en justice. Par exemple, si un jeune médecin saisit le syndicat parce qu’on ne leur verse pas leur prime de précarité en fin de contrat, nous allons écrire à l’administration de l’hôpital pour leur dire que c’est une prime qui doit être versée, et si elle ne l’est toujours pas, nous saisissons le tribunal.


Quelles difficultés rencontrent les jeunes médecins pour faire valoir leurs droits?


Dans la plupart des cas que je traite, l’administration est vraiment difficile en affaire. Elle ne fait pas preuve d’une très grande compassion vis à vis des médecins qui donnent beaucoup de temps à l’hôpital pour des rémunérations qui ne sont pas toujours là, et qui derrière sont dans des situations précaires de part les statuts de jeunes médecins. On a souvent des cas où l’administration fait preuve de mauvaise volonté en bloquant par exemple l’allocation de retour à l’emploi, ou le versement de la prime de précarité en fin de contrat tout ça parce qu’elle part du principe “on ne va pas payer cette prime là parce qu’ils ne nous la demanderont pas”. Et quand on vient la demander, elle rechigne quand même à la payer. C’est vraiment insupportable, parce qu’on a l’impression de donner des cours de droit. Les droits des médecins ne sont vraiment pas respectés par certaines administrations.

Comment remédier à cette situation?

Il faut un traitement plus humain des questions et des requêtes des jeunes médecins par l’administration. Aujourd’hui, c’est très mécanique. On vous dit non avant même de réfléchir à ce dont vous avez le droit. L’administration se doit d’avoir une rigueur de l’analyse juridique qui soit plus performante et qui la pousse à garantir les droits des jeunes médecins. On a l’impression qu’elle agit plutot pour protéger l’hopital en diminuant un maximum les coûts. Les primes de précarité devraient être versées automatiquement. Mais il faut systématiquement la réclamer, se battre pour l’obtenir… Trop souvent, l’administration est contre les jeunes médecins car elle défend des intérêts plus comptables que juridiques et humains.

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